Le nationalisme vaccinal : une maladie capitaliste

Face à la pandémie mondiale, les différentes bourgeoisies des grandes puissances capitalistes se sont lancées dans une course aux vaccins chaotique, au détriment de la santé publique.


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Poule aux œufs d’or

Les pays les plus riches accaparent la majorité des vaccins. Actuellement, 16 % de la population mondiale se réserve 60 % des stocks mondiaux de vaccins. Il s’agit, pour ces puissances impérialistes, d’atteindre le plus vite possible l’immunité collective, de façon à lever les restrictions sanitaires et, ainsi, relancer l’économie. Chaque grande puissance espère y arriver avant son voisin, quitte à sacrifier des vies et à engraisser Big Pharma.

Développés par Moderna et Pfizer, les vaccins de type ARN sont jalousement protégés par leurs propriétaires. Ils refusent d’autoriser le développement de versions génériques, malgré l’insistance de l’OMS. Ils ne veulent pas tuer la poule aux œufs d’or : pour la seule année 2021, leurs prévisions de ventes atteignent 18 milliards de dollars pour Moderna et 15 milliards pour Pfizer ! Pendant ce temps, le virus circule toujours et continue de muter dans les pays les plus pauvres, au risque de voir émerger de nouveaux variants plus infectieux, plus mortels – et qui résistent aux vaccins.

Division de l’UE

A l’heure où la coopération internationale serait pourtant indispensable, la « communauté » européenne se déchire. Pour éviter que des vaccins ne soient vendus hors de l’UE, la Commission Européenne a proposé de nouvelles mesures de contrôle des exportations. Mais ces mesures ont été immédiatement contestées par les dirigeants allemands, belges, finlandais, suédois et néerlandais. Ces pays sont impliqués dans la production de vaccins ; les nouvelles restrictions auraient nui à leurs exportations (et aux profits qu’elles génèrent).

Par ailleurs, l’achat en commun de vaccins avait fait l’objet d’un accord entre tous les pays de l’UE. Mais cet accord a été contourné par les pays les plus riches. Les dirigeants allemands ont passé un accord séparé avec Pfizer, pour un surplus de 30 millions de doses. Cela a déclenché un tollé et des passes d’armes diplomatiques à répétition entre Berlin, Bruxelles et différentes capitales européennes.

Diplomatie vaccinale

Pendant ce temps, la Chine et la Russie ont envoyé, au total, 800 millions de doses de vaccins Sinovac et Spoutnik V à 41 pays d’Amérique latine, d’Afrique, d’Asie et du Moyen-Orient. Pékin et Moscou ont également autorisé les pays produisant leurs vaccins (Indonésie, Emirats arabes unis, Malaisie) à en fabriquer des versions locales à bas prix. Ces politiques contrastent avec celles menées par les puissances occidentales, qui défendent leurs licences d’exploitation à tout prix.

Bien sûr, la stratégie des Chinois et des Russes n’est pas motivée par des considérations humanitaires. Il s’agit de conquérir des sphères d’influence et des marchés. Les rumeurs d’accords pour la production du Sputnik V par certains pays européens ont enfoncé un nouveau coin dans une « unité européenne » en pleine décomposition. C’est aussi un pied-de-nez aux Etats-Unis et à leurs tentatives renouvelées d’isoler la Russie.

De son côté, la Chine propose aux pays d’Afrique et du Moyen-Orient des accès préférentiels au vaccin Sinovac en échange d’investissements dans les infrastructures de ses « Nouvelles Routes de la Soie ». Celles-ci constitueront ensuite de nouveaux canaux et débouchés pour les capitaux chinois.

Une catastrophe économique et humaine

Sur le plan sanitaire, le « nationalisme vaccinal » est d’une criminelle absurdité. Le virus ne s’arrête pas aux frontières. L’immunité atteinte par un pays n’empêchera pas la circulation et la mutation du virus dans d’autres pays, débouchant in fine sur son retour sous une forme encore plus virulente.

Ces politiques sont également aberrantes d’un point de vue économique. Une étude de l’International Chamber of Commerce Research Foundation a démontré que si les pays pauvres n’ont pas accès aux vaccins, la poursuite de la pandémie à l’échelle mondiale coûtera aux grandes puissances des sommes faramineuses – et beaucoup plus importantes que le prix d’une sérieuse campagne vaccinale mondiale.

En concurrence sur le marché mondial, les différentes classes dirigeantes nationales sont incapables de s’accorder sur une politique globale. Chacune défend ses intérêts immédiats. C’est d’ailleurs ce qui explique la réticence des gouvernements à prendre des mesures de confinement. Ils ont tenté de protéger leurs économies plutôt que les vies humaines, pour finalement échouer sur les deux tableaux.

Exproprier et planifier

Le système capitaliste ne peut pas résoudre cette crise sanitaire de façon rapide et efficace. Il ne pourra pas davantage résoudre les prochaines crises sanitaires. Le mouvement ouvrier international doit en prendre acte et défendre des mesures qui s’attaquent à la grande propriété capitaliste.

Les entreprises pharmaceutiques devraient être nationalisées. Leurs recherches sont financées par l’argent public ; elles doivent devenir propriété publique. L’expropriation des installations existantes permettrait d’obtenir les capacités de production nécessaires à un plan de vaccination rapide et coordonné au niveau mondial. Mais pour que cela soit possible, nous devons arracher la gestion de la pandémie des mains des capitalistes et de leurs représentants politiques.

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